Auteur: Violette Diserens Binggeli  -  écrit en 2000      Localisation: Carouge et russin, Suisse  -  000 à 2010      Photographe: Jacques Binggeli  -  diapositives

JARDINS, OASIS DE MA VIE.
De tous temps les jardins ont été un symbole de paradis et de prospérité. Rappelez-vous le jardin d'Eden et les vallées où coulaient le lait et le miel dont parlent les livres anciens. Retournez dans les jardins suspendus de la Reine de Sémiramis, prodigieux, avec leurs édifices délicats et leur abondance de fruits et de légumes. Promenez-vous dans les jardins persans frais et paisibles, où il faisait bon se reposer à l’écoute des poètes et des baladins. Ou bien encore, rêvez dans la magie d’un jardin japonais. Même durant les heures noires du Moyen-Âge européen les jardins s’épanouissaient derrière les hautes murailles des châteaux forts et des monastères, comme ils n’ont cessés d’égayer les propriétés résidentielles de la Chine féodale.

Depuis le fond des âges, des systèmes de culture extrêmement variés sont utilisés de par le monde. Les hommes du désert ont creusés un ingénieux réseau de voies d’irrigation souterraines. Les Incas préféraient les canaux à ciel ouvert, qui tels des rubans argentés courraient le long des collines pour apporter l’eau aux plantations. L'Amérique du Nord est le spécialiste de la culture intensive sur des parcelles s’étendant à perte de vue, tandis que l’Asie passe outre les caprices de sa topographiques et cultive en terrasses. C’est au cœur de la forêt tropicale malaisienne que nous avons vu le plus petit des potagers du monde. Placé sur une

  table pour éviter les inondations, six cuvettes de plastique aux couleurs vives servaient de jardin. Dans chacune d’elles poussait un légume ! Touchés par cette simplicité, nous sommes restés là, immobiles sous la pluie, humbles et fascinés. Un autre mini jardin nous a cloué sur place. Lors d’une de nos expéditions dans les Rocheuses canadiennes, nos hôtes d’étape nous invitèrent à admirer leur trésor ; un jardin de 25 m2, protégé des rigueurs du climat par une serre des plus rudimentaire. Le joyau de ce jardin était un rosier planté dans un baril métallique, avec une splendide rose rouge en plein épanouissement. Que d’émotions et que de symboles dans ce jardin ! Du pur bonheur.

Nous possédons deux jardins. Le premier, un jardin d’agrément, est enchâssé au cœur du vieux Carouge ! De dimensions modestes, il ne manque pas de charme et sort même quelque peu de l’ordinaire ! Poussez la lourde porte de bois qui donne sur la rue et longez le couloir sombre, vous arriverez dans une cour traditionnelle, pavée de boulets. Tout au fond, un portail entrelacé de vigne vierge s'ouvre sur une exubérance de végétaux. Il y a des arbres inattendus comme des palmiers et des aralias, mais aussi un prunier et un vieux poirier. Lilas, chèvrefeuille, glycine, buddleias et roses trémières vous accueillent également dans un total dépaysement.

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*Répertoire faune et flore
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  Deux plans d’eau entourés d’une remarquable diversité de plantes abritent de petits poissons originaires d'Orient. Venant de Chine, les Macropodes à queue ronde* occupent le biotope centrale, et les Macropodes à dos rouge*, Vietnamiens, vivent dans un petit étang au fond du jardin. A l'ombre des aralias et des palmiers, des jarres chinoises emplies d’eau de pluie et de plantes de surface sont réservées à leur reproduction. Au centre du jardin, le rose vif des fleurs de nénuphar illumine les reflets sombres de l’étang exotique et la lumière du soleil joue avec la délicieuse transparence des feuilles des “Pondeteria cordatas”, dont les fleurs bleu-lavande pointent vers le ciel.

Entre mai et juin les splendeurs de la tourbière sont à leur apogée. Le grenat profond et les jaunes-verts lumineux des fleurs des plantes carnivores sont de toute beauté et rivalisent aisément avec l’étrangeté des formes et la subtilité des pièges de ces étranges végétaux. Les fougères déroulent leurs crosses à l'ombre des murs. Une ronce se faufile dans les reines des prés, au bord d’un petit étang dédié à la végétation européenne des zones humides. Vagabondant tout azimut, des tortues* vivent leur vie de tortue !

En clin d’œil au passé de la ville, quelques lignes de briques rouges délimitent des espaces. Romarin, laurier, menthe et sauge sont plantés en pleine terre, alors que l'origan, le thym, l'estragon et la sarriette sont en pot, alignés sur une terrasse méditerranéenne. Les nombreux “bonzaïs” d’arbres de nos contrées ont une place de choix sur une étagère de bambou surmontant un large muret de pierres sèches, lui aussi présentoir de nombreux arbres en pot. Les espaces libres, volontairement laissés à l’intérieur du muret de calcaire brun-jaune, offrent des refuges idéals pour la microfaune. Quelques petits points d'eau et des empilements de bois ou de pierres camouflés dans la végétation, ajoutent au confort des habitants du jardin. Tous, tritons, grenouilles, crapauds, libellules, papillons et oiseaux prospèrent en plein centre ville !

Notre second jardin, un potager situé à la campagne genevoise, reçoit beaucoup de visiteurs ! Quelques traces rondes et bien alignées sur une couche de neige fraîche trahissent le passage matinal d'un renard. Des fauvettes nichent dans les framboisiers et des gobe-mouches dans la haie d'aubépine. Ils sont si bien habitués à notre présence que nous pouvons les observer tout en vaquant à nos occupations. Taupes* et
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  campagnols* vivent dans les galeries souterraines qu’ils creusent sous nos plantations! Des sangliers viennent parfois chercher fortune dans les plates-bandes. Une nuit, ils ont labouré le sol autour de chaque légume sans en toucher à la moindre feuille ! Une autre fois, se sont les moutons du voisin qui sont venus goûter à notre production. Une grande variété d'insectes vit dans cet environnement exempt de produits chimiques. Des araignées transportent leurs œufs, bien fixés sur leur dos. D'autres tissent des toiles, qui au petit matin, se couvrent de fines perles de rosée. Vert, rouge, jaune ou chamarrés les élytres des coléoptères reflètent le zénith. Lézards et amphibiens viennent festoyer dans notre jardin pour le plus grand plaisir des couleuvres. Il nous est arrivé de déranger une couleuvre d'Esculape* en soulevant une plaque de tôle ondulée, laissée comme refuge dans un coin du terrain. Tête dressée, elle est descendue jusqu’en bas du jardin en hautes vagues verticales puis a disparut dans la haie… C'était spectaculaire !

D’énormes citrouilles oranges et ventrues trônent sur le tas de compost, tandis que leurs feuilles en formes d’acanthe dévalent ses pentes et débordent dans la jachère. Sur les plants de tomate régulièrement pincés, les fruit-légumes luisant et charnu poudroient dans les rayons du soleil. Un pêcher de vigne et un néflier européen* ont été choisis pour leur rareté ; des scorsonères, des topinambours et des rutabagas, quelques peu tombés dans l’oubli, nous parlent du passé. Au printemps les pétales des fleurs de cerisier enneigent les plates-bandes. Les oiseaux se régalent de framboises, de groseilles à maquereau ou de cerises, lorsque nous sommes en retard pour la cueillette !

En dessus du jardin nous avons creusé deux petits étangs pour favoriser la faune et la flore aquatique locale. Sur l’une des berges, un muret de pierres sèches offre de nombreuses cachettes à la microfaune, qui en profite aussi pour se chauffer au soleil. Les abeilles, les oiseaux et les lézards verts viennent se désaltérer aux plans d’eau. Tritons, crapauds et grenouilles s’y reproduisent. Des nénuphars blancs et des iris jaunes augmentent le charme de ce petit biotope.

Nous sommes fascinés par l’extrême complexité de la nature. N'est-il pas extraordinaire que la petite graine que l’on plante devienne un chou, des petits poids ou un pommier ? Nous aimons les vieilles recettes comme par exemple semer des graines de radis et de carottes
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  ensemble, dans le même sillon. La récolte des radis éclaircira automatiquement les carottes. Il est aussi judicieux de planter des œillets d’Inde* parmi les fraisiers, afin de les protéger des nématodes* qui raffolent de leurs racines. Les racines des œillets d’Inde émettent une substance chimique qui durcit les œufs des petits vers prédateurs. Ils ne peuvent donc plus éclore ! Des brassées d'orties, couchées entre les rangées de pommes de terre buttées, les sauvent des doryphores*. Une infusion d’orties pulvérisée sur les choux les préserve des chenilles de leur papillons attitrée, les piéride du choux*. D’autres astuces sont aussi extrêmement utiles.

Recouvrir les chemins avec de l'écorce de pin acidifie considérablement le sol, et empêche l’implantation d’herbes indésirables. Planter des légumineuses enrichi la parcelle en azote. La terre peut être allégée avec du sable, et nourrie de cendres, d’algues, de crottin de cheval ou de poudre d'os. Les semis sont faits avec du compost, dont nous avons consciencieusement sélectionné les éléments, et que nous avons amoureusement élaboré au fil des saisons. Melons, courgettes et autres cucurbitacées reposent sur de petits lits de paille. Les tiges des petits poids s’enroulent sur des cannes de maïs. Les haricots verts montent à l'abordage d’une armature de bambou haute de 3 mètres.

Pendant l'hiver, nous nous réjouissons de déguster les légumes frais fournit par le potager. Les pommes de terre de nos régions, plantées le 14 juillet, donnent de délicieuses pommes de terre nouvelles pour Noël. Les petits tubercules jaunes que nous avons rapportés de Colombie produisent naturellement deux fois par an. La courgette vagabonde, transmise par un jardinier français de Haute Provence, peut être conservée jusqu’au mois de novembre. Les racines de chicorée plantées dans du sable, dans une cave bien aérée, donnent d’excellentes endives. Pour conserver les légumes racine, tels que le céleri, les carottes, les navets et les betteraves, nous avons creusé un silo dans le jardin. La mâche peut être récoltée très tard dans la saison. Même sous une fine couverture neigeuse ! Laissée sur pied, la salade pain de sucre reste longtemps comestible et croquante. Les choux blancs, ronds et fermes font une choucroute succulente. Aux premiers beaux jours, des pousses tendres et délicieuses se développent sur les choux de Bruxelles et les côtes de bettes laissés eux aussi tout spécialement sur pieds pendant l'hiver.
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  Pour réussir la création d’un jardin harmonieux il n'est pas nécessaire de posséder un grand espace. Le secret réside dans nos capacités à sentir vibrer notre lopin de terre, à être à l’unisson avec lui. Il est tout d’abord essentiel de bien connaître son orientation, la force et la qualité des vents régionaux auxquels il est soumis, l’intensité et la durée de son ensoleillement journalier et enfin la composition de sa terre, en surface comme en sous-sol. Ces informations vous permettront de choisir judicieusement les espèces de légumes, de fruits, de plantes et/ou de fleurs que vous allez cultiver. L'emplacement de chacune d'elles doit être choisi selon ses propres spécificités et les formes des plates-bandes définies avec une grande précision afin d'obtenir l'effet désiré. Il est essentiel de dessiner le plan du jardin sur papier et de tenir compte de tous les paramètres. Les graines et les plantons peuvent être achetées sur les marchés, dans les centres de jardinage ou par catalogue. Faire des échanges ou ramener les semences de voyages est particulièrement enrichissant. La littérature a aussi toute son importance. Ancienne ou récente, d’ici ou d’ailleurs, elle est un absolument indispensable.

Comme les oasis sont les jardins du désert, nos jardins sont les oasis de notre vie. Le temps que nous y passons est aussi précieux pour l'esprit que pour le corps. S’y reposer, le contempler et y méditer régénère les sens. L’observer et s’informer accroît les connaissances. Bêcher, creuser, labourer, porter des charges ou travailler au grand soleil et sous la pluie fortifie autant physiquement que moralement. Les mystères et l'exotisme de notre jardin citadin sont une source d’émerveillements sans cesse renouvelés. L'orientation de notre lopin campagnard nous enchante. Incliné à l'ouest il fait face à une vallée verdoyante et protégée où coule une rivière encore libre ; les oiseaux qui le survolent, milans, faucons et martinets étirent notre horizon jusqu’à l'infini. Lorsque nous travaillons dans ces jardins nous faisons pleinement partie de la Grande Nature; nous nous sentons connectés à d’autres civilisations de par le monde et à travers les âges. C'est une expérience fantastique !
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